Du silence, mais pas que !
Il y a parfois un grand décalage entre la théorie et la pratique. Entre ce qui est inscrit, noir sur blanc, sur une fiche technique, et la sensation d’un guidon entre les mains. Entre l’autonomie maximale vantée par un commerçant et le sentiment de trahison lorsque l’on se retrouve contrainte de rouler à 25 km/h pour espérer rentrer chez soi avant la panne.
Je teste des scooters et motos électriques depuis 2018 dans la rubrique Vroom de Numerama ; des petits, des gros, des deux-roues, des trois-roues, des modèles qui n’existent plus, car n’ayant pas trouvé leur cible, d’autres parce qu’en rupture de stock… Cependant, ce n’est qu’en janvier 2021 que j’ai décidé de passer le cap pour me diriger vers le tout-électrique.
Après un an à rouler avec mon propre deux-roues électrique, j’ai changé d’avis sur certains aspects de ce nouveau mode de transport — souvent pour le mieux. Est-ce que je regrette de conduire un électrique ? Non. Ai-je trouvé la solution de mobilité parfaite pour moi ? Non plus. Mais je ne reviendrai pas en arrière.
Laissez-moi vous raconter ce que j’ai appris au cours de ces 12 derniers mois à conduire quasi quotidiennement un véhicule que l’on présente comme l’une des branches du « futur » des transports « plus propres ». Oui, ça fait beaucoup de guillemets.
Comme beaucoup de conducteurs et conductrices qui changent de véhicule, j’ai attendu le déclic. Le mien eu lieu un 27 décembre 2020, devant la gare de l’Est à Paris, devant le scooter thermique que j’avais laissé quelques jours sur une place de stationnement pendant les fêtes de Noël. Il ne démarrait plus. Ce n’était pas la première fois : j’avais effectué plusieurs grosses réparations ces derniers mois, changeant notamment la batterie du Piaggio 125 qui me suivait depuis 2011.
Écroulée sous le poids de mes sacs de voyage, casque et gants, j’ai pris une décision : c’était la panne de trop. Il fallait que je change de scooter.
Je me suis rapidement orientée vers le Rider 5000. Comme on le répète souvent sur Vroom, tous les goûts sont dans la nature, et il faut surtout que le véhicule corresponde à vos besoins. Lorsqu’on veut acheter un scooter électrique, il faut surtout identifier ses critères indispensables, et ceux que l’on pourrait éventuellement mettre de côté. Car, disons-le tout de suite, quand on achète un scooter électrique en 2021, il faut accepter de faire des compromis.
Il me fallait un équivalent 125 (pour rouler sur le périphérique parisien, voire des portions d’autoroute à 90 km/h) avec une batterie amovible (j’habite un appartement en étage) et, si possible, avec une place pour mettre un deuxième casque sous la selle.
Le NGT étant limité à 70 km/h, le Super Soco CPx n’étant vraiment pas à mon goût, les maxi-scooters n’ayant pas de batterie amovible et le Silence S01 étant un peu trop cher pour moi, j’ai donc opté pour le Rider 5000, que j’avais essayé un an plus tôt.
Je n’ai jamais retrouvé la qualité de mon scooter thermique en termes de finitions, quel que soit le deux-roues que j’aie testé. Vous ne trouverez quasiment que des carrosseries en plastique, des assemblages parfois un peu bancals, des boitiers qui ferment mal… Sous les selles des engins, la majeure partie des batteries (à part Unu qui a cherché à faire un effort) sont juste posées, sans cache, et il n’est pas rare que des câbles de branchement pendouillent.
Plus cocasse encore, il y a ces modèles qui ont été fabriqués à base d’éléments de scooters thermiques et qui en gardent les stigmates (on pense au voyant de pompe à essence du Rider Ng ou la trappe à essence à peine scellée sur le e-trax).
Le Rider 5000 se base clairement sur une imitation de l’indémodable Vespa, mais je ne l’ai pas choisi pour cela, car les modèles un peu plus originaux (et qui assument d’avoir un look différent parce qu’ils sont électriques) me plaisent également. On reconnait par exemple facilement l’allure carrée des Niu quand on en voit passer un dans la rue.
Cela peut paraître bête à écrire, mais le scooter électrique est un mode de transport vraiment silencieux. Lorsque l’on vient de 10 années sur un deux-roues thermique, la sensation est presque étourdissante. Au cours de mes premières balades, j’avais l’impression de glisser sur la route. J’ai aussi remarqué que quand il y a moins de bruit autour de soi, on s’énerve moins vite : on prend un peu plus de recul, on profite des temps de pause.
La conséquence directe est rude à admettre, mais il me faut être honnête : je suis devenue intolérante au son des scooters thermiques. Je ne les supporte plus. Des gros T-Max que les bonhommes conduisent obligatoirement les jambes surélevées vers l’avant aux petits 50 au pot d’échappement troués, leur son m’agresse les tympans et me tape sur le système.
J’avais déjà remarqué ce décalage lorsque je retrouvais mon Piaggio 125 après plusieurs jours passés à tester un modèle électrique, mais cette sensibilité au bruit s’est renforcée depuis cette année. Il est clair et net que je ne rachèterai jamais de scooter thermique, et le bruit fait partie des raisons.
Je dois toutefois compléter ce retour d’un avertissement : rouler avec un appareil rapide et silencieux peut être très dangereux, car personne ne vous entend arriver. Cela inclut les piétons qui traversent au rouge, les vélos en train de doubler, les voitures au feu… Ils ont, pour la plupart, l’habitude de tendre l’oreille pour éviter les dangers. En tant que conductrice, il m’est déjà arrivé de piler net devant un piéton qui n’avait pas regardé avant de traverser. Et comme je vous vois venir : oui, c’est sa faute, mais non, ce n’est pas une raison pour l’écraser.
Ralentir avec un scooter électrique n’est pas tout à fait similaire que sur un thermique, sur lequel on a l’habitude de perdre de la vitesse lorsqu’on lâche la poignée d’accélération. Or sur certains deux-roues (Niu notamment), la décélération est très légère, même quand on ne touche plus la poignée droite ; il faut alors freiner plus, plus souvent et plus longtemps. C’est l’un des plis que j’ai pris le plus de temps à prendre, car j’avais l’habitude d’anticiper les ralentissements et ne freiner qu’en cas d’extrême urgence.
Il y a toutefois un gros avantage à freiner plus souvent : le freinage régénératif, que l’on trouve sur les scooters, mais aussi les voitures, et qui permet de convertir le freinage en un courant électrique qui viendra se stocker dans la batterie. Je l’observe régulièrement quand mon niveau de batterie n’a plus que deux crans sur le tableau de bord : lorsque je freine, je peux faire remonter le niveau d’un cran supplémentaire (bien sûr, ça ne dure pas longtemps, mais c’est toujours ça de pris).
500 euros d’essence en moins par an à payer
Dans tous les cas, le gain financier en recharge électrique sera toujours plus intéressant que lorsque je conduisais un thermique : à raison d’un plein de 7 euros tous les 5 jours, je dépensais en moyenne 500 euros d’essence par an. En un an passé à recharger ma batterie à la maison (et un peu au bureau), je n’ai pas vu ma facture d’électricité augmenter. Ce gain-là est net.
Petite batterie, grosse batterie, une batterie fixe, deux batteries amovibles… On compte quasiment autant d’approches que de scooters électriques sur le marché en France. Là encore, c’est à vous de voir ce qui vous conviendra, en fonction de votre lieu d’habitation et vos pratiques de déplacement.
Ce qui est certain, c’est que l’industrie tout entière est encore dans l’attente d’une évolution en recherche et développement : le fabricant qui trouvera la manière de créer des batteries beaucoup plus petites et beaucoup plus puissantes emportera un sacré pactole (c’est d’ailleurs pour ça que des milliardaires comme Elon Musk sont sur le coup).
Par exemple, j’ai remarqué que les conducteurs et conductrices qui se plaignaient le moins de l’autonomie des scooters électriques (et motos, qu’on teste également sur Vroom) habitaient dans des maisons avec un garage. Certains habitent plus loin de la ville et ont besoin d’un gros scooter : celui-ci n’a pas de batterie amovible, mais ils peuvent du coup brancher leur véhicule tous les soirs tranquillement en rentrant chez eux, comme d’autres mettent à charger leur smartphone avant d’aller se coucher.
Habitant un appartement au sixième étage sans ascenseur (oui, j’ai un bon cardio), il m’est tout bonnement impossible de charger mon scooter depuis une prise secteur (oui, même avec une très, très grande rallonge). Comme je voulais une grosse autonomie (100 km affichés), j’ai donc opté pour une grosse batterie. Très grosse. Trop grosse.
Il s’agit clairement de mon plus gros compromis : la batterie pèse 19 kilos (oui, du coup, je suis musclée), et la retirer à chaque fois de l’habitacle sous la selle est un défi. Je dois bien l’avouer, j’ai parfois profité (enfin, entre deux confinements et obligations de télétravail) de l’ascenseur de Numerama pour y charger ma batterie et éviter l’agonie de la monter sur 6 étages… Mais le reste du temps, il a fallu m’armer de courage pour affronter cette ascension qui donne envie de retourner où j’émettais beaucoup de particules de CO2 dans l’atmosphère en faisant beaucoup de bruit (non) (quand même).
Adieu la spontanéité, me voilà adulte et prévoyante
Cependant, la galère va plus loin. Le plus gros compromis que je n’avais pas vu venir en choisissant un scooter électrique se loge dans la notion de spontanéité. Désormais, si on m’invite à une soirée à l’autre bout de la ville et que mon scooter électrique n’a plus qu’une barre de batterie, je suis fichue. Car, si tant est que je puisse y aller, je n’aurais sûrement pas assez d’énergie pour revenir chez moi.
Comme je le raconte dans la vidéo qui accompagne cet article, il m’est déjà arrivé de partir avec une jauge que je pensais assez élevée (c’est l’un des problèmes du Rider 5000, son compteur est peu précis), puis la voir fondre comme neige au soleil à mesure que j’atteignais les 70 km/h sur le périphérique. J’ai même été contrainte de prendre la première sortie pour me trainer à 25 km/h sur le reste du trajet et pouvoir arriver chez moi avant que la batterie ne soit totalement à plat.
Il existe bien des solutions en cours de développement, comme ZeWay et ses batteries échangeables, mais pour l’instant, il faut faire avec : charger une batterie de scooter électrique, c’est long (au moins 6 heures) et il faut parfois adapter son emploi du temps en fonction. Si vous ne sortez pas beaucoup, ce problème vous affectera sûrement moins. Pour ma part, la solution a été de la recharger un peu plus souvent, même lorsqu’il lui reste 10 ou 20 km d’autonomie dans les roues, afin d’être sûre de ne pas tomber en rade.
Une autre astuce serait d’acheter une batterie supplémentaire pour en avoir toujours une toujours pleine à portée de main. Mais d’une, cela coûte cher (près de 1 000 euros par batterie), et de deux, c’est une aberration écologique.
On sait que les scooters électriques ne sont pas des « solutions propres » : s’ils n’émettent pas de CO2 dans l’atmosphère, leur fabrication est tout de même polluante, qu’il s’agisse des usines en Chine, du processus d’importation, mais surtout des batteries, qui sollicitent une industrie minière polluante et qui sont très difficiles à recycler.
À noter que la mairie de Paris envisageait de rendre payantes les places de stationnement pour les scooters thermiques au 1er janvier 2022, mais que cela a été repoussé à septembre 2022. Laissant encore quelques mois de répits aux propriétaires qui souhaiteraient effectuer la bascule.

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Crédit photo de la une : Louise Audry pour Numerama
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